Le cas Marylin Manson, star d'un rock fusionnant tout (ou presque) ce qu'il a été, du psyché au death metal (surtout !) en passant par le glam et le queen enragé déverse violemment une pléthore de signes et de codes antisociaux pour nourrir l'imaginaire tourmentesque et un rien crad' d'adolescents obèses, adénopathiques, boutonneux, caractériels et retardés.
Mylène Farmer nous avait habitués à un romanesque qui n'avait de romantique que le morbide des prod's de son pygmalion Laurent Boutonnat. Le monde du show-biz psychiatrique regorge de talents ne serait-ce qu'en égard au fait que la folie de l'artiste est certainement parmi les mieux reconnues et/ou acceptées, car un regard sur l'histoire - pas seulement la nôtre ! - permet sinon de s'en convaincre du moins de comprendre le lien entre le personnage d'artiste et celui de fou.
Et on vit les Virgin Prunes balancer des têtes de veau exfliltrées d'abattoirs sur l'assemblée de fans livrés à des transes déprav', Xtian Death, puis leur avatar Marylin Manson leur vomir dessus, s'agitant sur les braises du bûcher de vanités rockambolesques en y agitant le pandemonium des horreurs subversives et obscènes qui envoûtent l'adolescence par essence rebelle et tourmentée.
Les Hells Angels avaient passé la main à certains skinheads pour terroriser les populations et c'est en toute urbanité que le tag se répand aujourd'hui sur les peaux percées et scarifiées de rebelles introvertis sur le cyber- théâtre de leur cheminement complexe.
Masque
Celui qui met un masque a un message à faire passer et dans presque tous les cas devient "une chose" qui entre en lui puis se déploie, se manifeste d'autant plus sûrement qu'un ensemble d'informations parasites est alors filtré, caché aux spectateurs contraints à pallier le manque perceptif en sollicitant la fonction imaginaire. Avec le masque tout, ou presque, est permis, dès lors que l'imagination est excitée par un vide cognitif. La question peut-elle être ici celle de l'existence d'un désir déguisé, et lequel ? Il y a du plaisir là-dedans : ressenti par le porteur c'est certain ; par le spectateur : c'est une autre histoire plus compliquée à raconter.
Le public envoûté par les éructations de stars masquées éjaculant un rock paroxystico-cataclysmique jouit pleinement de cette exhibition pourvoyeuse de transes habitées par des entités surgies des délires d'un Lovecraft ou autre Stephen King, goûtées dans l'extase par les adorateurs de ctuhluh et nyarlathotep, ou encore de jeux vidéo célébrant la violence meurtrière, ce qui au fond est sans doute la même chose.
Le masque parfois matérialisé par le maquillage est l'artifice par lequel l'artiste, le mage ou le fou filtre sa relation au monde. Il va jusqu'à résoudre l'opposition entre la séduction et l'horreur car sous le masque du clown se cache plus aisément le criminel. L'alliance des deux définit presqu'absolument la perversité, et c'est bien là toute la question du caractère potentiellement satanique d'un des avatars du rock, parmi les aliens que ce mouvement culturel a produits.
Déjà les puritains paraphréniques du fin fond du trou du cul des US s'étaient mis à faire tourner les vinyls à l'envers pour y entendre des imprécations d'un genre particulier quand tout groupe de musiciens suspects d'on ne sait quoi de vraiment déplaisant faisait l'objet de cette sorte de chasse aux sorcières consistant à user de tous moyens même insolites pour discréditer une idée ou stigmatiser une population. On faisait entendre alors aux péquenauds du midwest ce qu'on voulait d'obscénités et de blasphèmes en inversant la rotation du tourne-disques : "vous entendez, là : ils disent satan, 666, belzébuth, fuck jesus !" et on expliquait qu'il s'agissait d'une conjuration sataniste quand ce n'était un message codé annonçant la mort de Paul Mac Cartney ou une conspiration contre l'État ourdie par les communistes.
Tout cela aussi a fait le prestige et la gloire du rock.
Rejoignez-moi chez Mastodon ou Piaille ou Ravenation ou XYZ ou Mamot