Objet culte du consumérisme : la "carte cadeau"

Classé dans : Humeur, Société - Mots clés : aucun


Les fêtes approchent... un anniversaire est à célébrer, une mère à honorer, mais dans un univers où la liberté de prendre son temps fait de plus en plus défaut, ne serait-ce que pour réfléchir un tant soit peu, voici qu'on ne veut pour rien au monde passer pour un ingrat ou un goujat au yeux de qui s'attend à quelque présent de votre part. Mais peut-être que - dans le fond - vous n'avez pas envie de trop vous prendre la tête à réfléchir des plombes pour identifier LE cadeau qui fera plaisir à votre ami, votre épouse ou votre mari, votre fille ou votre fils, votre père ou votre mère, voire votre belle-mère ou votre tante à héritage... Qu'à cela ne tienne, les marchands ont trouvé LA solution propre à satisfaire votre indigence imaginative ou votre paresse intellectuelle : la "carte-cadeau".

De carton délicatement "glossy" ou toute de plastique faite telle une carte bancaire aux couleurs chatoyantes et marquée du montant des achats que l'heureux(se) élu(e) pourra réaliser dans le magasin que vous aurez choisi pour elle ou lui, vous voici enfin en mesure de provoquer un immense plaisir chez la personne concernée moyennant une formidable économie de temps à défaut de celle de moyens. 

Prétextant la liberté du choix de "son cadeau", vous oublierez ainsi trop vite que vous aurez choisi pour elle une marque, une enseigne, autrement dit, un marchand qui passe des heures à vous matraquer la tronche à coup d'affiches et de clips télévisés. Vous aurez aussi relégué aux oubliettes que le savoir-vivre voulût que le coût d'un présent ne fût pas connu de son bénéficiaire, et qu'enfin un cadeau réflète la part d'intimité partagée avec la personne à laquelle il s'adresse en ce que le plaisir même qu'il procure relève de la connaissance qu'on a de ses goûts, de ses prédilections et, accessoirement, de ce qui manque à son bien-être ou son confort.

Ainsi, la "carte-cadeau" se donne-t-elle - toute honte bue - comme le signe navrant d'une société consumériste parvenue à son accomplissement, d'un système mercantile ultra-libéral, prodrome de la perte de ces valeurs sociales qui fondent la célébration des liens privilégiés ; vous aurez aussi perdu de vue que ce bordel mercantile n'est que le symptôme de l'accélération du temps vécu, et au final, parangon du mauvais goût, de la grossièreté, en somme, d'un manque tout à la fois évident et affligeant du plus élémentaire des savoir-vivre. 



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